Initié à la musique depuis l’âge de 8 ans par son professeur Ferdina, Abou Sinpole a commencé par faire de la musique traditionnelle, des chansons de mariages. En 2020, l’avenir musical de l’artiste connait un tournant, et le fait entrer dans le monde du slam. Aujourd’hui, il compte dans sa discographie, 1 EP et 4 albums dont « DJE Vol.2 » qui vient de sortir le 28 septembre dernier. Nous sommes allé à sa rencontre …
NEWZIKAL : Bonjour Abou Sinpole. Tu viens de sortir ton nouvel album DJE VOL2. Tu peux nous expliquer le concept DJE et pourquoi un volume 2 ?
ABOU SINPOLE : DJE est une interrogation, une remise en question entre le citoyen comorien et l’argent dans notre société. L’argent nous pousse à mettre nos vies en danger, notamment dans une optique de vouloir à tout prix quitter les Comores. L’avidité de l’argent pousse le « je reste » comorien, à maltraiter, user, abuser même de nos parents, sœurs & nos frères en France. Comme une nouvelle forme de traite négrière. Tu es en Europe, tu travailles, tu es obligé de subvenir aux besoins de la famille restée au pays jusqu’à ce que tu meurs. On se soucie moins des conditions de vie de nos familles de la diaspora.
DJE, Vol. 2 est donc une histoire de choix comme je le dis dans le premier titre « Gongua » qui signifie « cloche de fin » en comorien. Toi, en tant qu’être humain, resté aux Comores, tu fais quoi pou réussir ta vie ? Tu attends que tes proches à l’étranger te prennent en charge au lieu de réfléchir à comment te prendre en charge toi-même. Sachez que le bonheur n’est pas forcément qu’en Europe. Donc je me pose la question « DJE ».
NZKL : Les collaborations sur ce nouvel album ?
AS : L’écriture est une forme d’art plutôt très égoïste parce que c’est personnel, mais il arrive qu’on ait besoin d’une vision différente par rapport à certains sujets qu’on ne peut pas exposer seul. Sur le premier titre de l’album, « Gongua », j’ai cherché de l’aide auprès d’Aydii Lamany. Il y’a également Djamodjama dans l’album, que j’ai invité pour son côté festif sur le titre « Twerk ».
NZKL : Tu es très actif ces derniers temps avec plusieurs projets sortis, comment tu arrives à concilier études et musique ?
AS : En réalité, pour ma part, c’est très facile de concilier étude et musique notamment en France. Je considère la musique comme une activité, un hobby. Aux Comores je n’ai pas eu le temps d’être très productif parce qu’on a les petits frères, les tâches domestiques, les besognes aux champs. Entre nous, je faisais du béton au bled pour me payer un portable afin d’écrire et télécharger des instruis ; jusqu’au jour, où un entrepreneur franco-comorien, habitant à Paris, m’a déniché avec le titre « Ho Manga ». Il m’a approché et m’a demandé si je voulais enregistrer le titre dans un bon studio et le distribuer par la suite. Une occasion que j’ai saisi direct. Il m’a donc payé un studio, je suis allé pour un titre et ressorti finalement le même jour avec un EP de 6 titres ! À partir de là, il m’a dit qu’il allait créer un label et que j’aurai un budget mensuel pour la production. Tout ce que j’ai à faire, c’est de créer et faire ce que j’aime. En gros, me défouler !
Je fais cela parce que j’adore la musique sur toutes ses formes, world, traditionnelle, hip-hop, slam … et le fait qu’un label me finance en me cédant la totalité de droits d’auteur, pour ce que j’aime, je n’ai pas envie de décevoir le producteur. Je vais au studio dès que j’ai du temps libre.
NZKL : Que représente le slam pour toi ?
AS : Pour moi, lorsque tu fais de la musique autre que du twarab, t’es très mal compris aux Comores. Etrangement le slam est très apprécié des adultes. C’est de la poésie comme à l’époque des Griots, c’est peut-être cela qui fait sa neutralité aux Comores !? Etant amateur de poésie, je me suis retrouvé à faire du slam. Cela m’aide à m’exprimer librement. Toutefois, rester que sur le slam c’est saoulant à la longue car il y’a trop de morale et peu de gens aiment ça (rires). Dans mes chansons, je garde l’écriture slamé au niveau des couplets tout en faisant des refrains chantés pour innover le genre. Avec la mélodie, par exemple, les plateformes de streamings m’ont classé dans la catégorie Pop.
Abou Sinpole – Discographie :